Souveraineté des données : illusion ou réalité ?

Dans un monde de plus en plus connecté, où les données personnelles circulent à une vitesse vertigineuse à travers les frontières, la question de la souveraineté des données a gagné en pertinence.

Les États cherchent à protéger les informations de leurs citoyens face à la domination des géants technologiques et à la mondialisation des échanges numériques. Mais cette quête de contrôle est-elle véritablement réalisable, ou relève-t-elle d’une illusion face aux réalités techniques et économiques mondiales ?

Comprendre la notion de souveraineté des données  ?

La souveraineté des données se réfère au contrôle et à la gestion autonome par les individus de leurs informations personnelles. Ce contrôle met en évidence le droit de décider quelles données sont collectées, comment elles sont utilisées et avec qui elles sont partagées.

Autrement dit, la notion de souveraineté des données est nécessaire pour garantir la confidentialité, la sécurité et les droits des utilisateurs dans un monde où les données sont devenues une ressource précieuse. Au niveau individuel, la souveraineté des données signifie que chaque personne a le pouvoir de protéger ses informations contre une utilisation abusive ou non autorisée. Toutefois, cette souveraineté est mise à mal par les pratiques des grandes entreprises technologiques et les défis de sécurité dans le contexte numérique actuel. C’est pour cela qu’il importe de prendre des mesures pour la protéger.

Une souveraineté reconnue par le législateur béninois

Pour protéger la souveraineté des données, de nombreux pays ont mis en place des régulations strictes. En Europe, le Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD) est l’un des cadres les plus robustes, garantissant des droits étendus aux individus sur leurs données personnelles. En République du Bénin, la loi n° 2017-20 portant Code du numérique, adoptée en avril 2018, constitue le cadre juridique principal pour la protection des données personnelles. 

Cette loi impose des obligations aux responsables de traitement des données et définit clairement les droits des citoyens en matière de protection des données. Par exemple, l’article 437 de cette loi dispose que « Toute personne physique dont les données à caractère personnel font l’objet d’un traitement peut demander au responsable de ce traitement : les informations permettant de connaître et de contester le traitement de ses données à caractère personnel ». L’Autorité de Protection des Données à caractère Personnel (APDP) est l’organisme chargé de veiller à la mise en œuvre de cette loi et à la protection des données des citoyens béninois. Cependant, malgré ces régulations, des défis persistent. La mise en œuvre efficace des lois et la conformité des entreprises restent des défis majeurs, en particulier dans les pays émergents comme le Bénin, où les ressources et les capacités institutionnelles peuvent être limitées.

Les menaces à la souveraineté des Données

La souveraineté des données est confrontée à plusieurs défis majeurs. Les grandes entreprises technologiques, souvent appelées GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon), collectent d’énormes quantités de données sur les utilisateurs, souvent sans consentement explicite ou compréhension de l’utilisation finale. Cette exploitation pose des questions de consentement et de transparence. De plus, les violations de données et les cyberattaques sont des menaces constantes. En 2020, par exemple, une violation massive de données a touché des millions de personnes dans divers pays, y compris au Bénin, où les infrastructures de sécurité peuvent être vulnérables. Il existe également un manque de sensibilisation et d’éducation parmi les citoyens et les entreprises sur l’importance de la protection des données personnelles. Beaucoup de Béninois ne sont pas pleinement conscients de leurs droits et des risques liés à la gestion des données, ce qui complique la mise en œuvre des meilleures pratiques en matière de souveraineté et de sécurité des données.

Vers une meilleure souveraineté des données au Bénin

Pour relever ces défis, plusieurs initiatives peuvent être mises en place. Des campagnes de sensibilisation et d’éducation sont essentielles pour informer les citoyens de leurs droits en matière de protection des données. Les médias, les écoles et les institutions publiques peuvent jouer un rôle clé dans cette sensibilisation au Bénin. Il est également important de former les professionnels de divers secteurs sur les meilleures pratiques en matière de gestion et de protection des données personnelles. Cela inclut des ateliers, des séminaires et des programmes de certification.

L’Autorité de Protection des Données Personnelles (APDP) peut jouer un rôle central en fournissant des formations et en certifiant des spécialistes en protection des données. Investir dans des infrastructures technologiques robustes est aussi déterminant pour garantir la sécurité des données. Le gouvernement et les partenaires privés doivent collaborer pour moderniser les systèmes de gestion des données au Bénin. L’APDP doit recevoir un soutien accru en termes de ressources humaines, financières et techniques pour renforcer ses capacités de régulation et de contrôle. Cela inclut la formation de son personnel et l’acquisition de technologies avancées pour la surveillance et la protection des données.

En tirant parti des technologies avancées, de la collaboration internationale et des initiatives de sensibilisation, le Bénin peut renforcer la protection des données personnelles et garantir que chaque individu puisse être véritablement souverain de ses données. La route est encore longue, mais avec des efforts concertés, la souveraineté des données peut devenir une réalité pour tous les citoyens béninois. Le développement d’une culture de protection des données au sein des organisations et du public est essentiel. Cela peut être réalisé par le biais de politiques internes rigoureuses, de programmes de formation continue et d’une communication transparente sur les mesures de sécurité mises en place. En exploitant les opportunités de collaboration internationale et d’innovation technologique, le Bénin peut avancer vers un environnement numérique plus sûr et plus sécurisé pour ses citoyens, où chaque individu a un contrôle total et transparent sur ses informations personnelles.

Arthur W. ARAYE


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