LES RESEAUX SOCIAUX AU BENIN : MINE D’OR OU MINE A RISQUES POUR NOS DONNEES ?

Imaginez un instant que vos interactions quotidiennes sur les réseaux sociaux, allant des photos partagées aux opinions exprimées, deviennent des outils exploités pour vous profiler, influencer vos choix ou même compromettre votre vie privée. Ce scénario soulève des préoccupations légitimes sur la gestion des données personnelles, notamment dans un pays comme le Bénin, où l’usage des réseaux sociaux explose, mais où les mécanismes de protection des données personnelles demeurent moins efficaces pour le moins. Alors, les réseaux sociaux représentent-ils une richesse à exploiter ou une menace à appréhender ? Cet article explore les dimensions juridiques, économiques et sociales de cette problématique

Qu’entend-on par données personnelles ?

Les réseaux sociaux, comme Facebook, Instagram, ou TikTok, collectent une quantité massive de données, qu’elles soient explicites (nom, âge, localisation) ou implicites (préférences, interactions, temps passé sur des contenus spécifiques). Ces données, qualifiées de personnelles selon la loi N°2017-20 du 20 Avril 2018 portant Code du Numérique en République du Bénin, concernent « toutes informations de quelque nature que ce soit et indépendamment de son support, y compris le son et l’image, relatives à une personne physique identifiée ou identifiable ». Autrement dit, une donnée personnelle est tout renseignement permettant d’identifier directement ou indirectement une personne. Leur gestion inadéquate peut entraîner des risques graves pour les utilisateurs, tels que le vol d’identité, le harcèlement ou des manipulations psychologiques.
Dans ce contexte, les réseaux sociaux deviennent une mine d’informations précieuses pour des entreprises ou des cybercriminels cherchant à exploiter les données à des fins commerciales ou malveillantes.

Les réseaux sociaux : un atout économique pour le Bénin

Les réseaux sociaux ne se limitent pas à être des plateformes d’interaction sociale ; ils constituent également des moteurs économiques. Au Bénin, ces plateformes permettent à des milliers d’entrepreneurs et de créateurs de contenu de développer leurs activités, d’atteindre de nouveaux publics et de générer des revenus. Elles favorisent également une démocratisation de l’accès au marché numérique, offrant des opportunités même aux petites et moyennes entreprises.
Les campagnes publicitaires ciblées, basées sur l’analyse des données des utilisateurs, permettent une efficacité accrue pour les entreprises. Par exemple, une société peut promouvoir ses services auprès d’un public spécifiquement intéressé grâce à l’algorithme des réseaux sociaux. Cependant, cette exploitation économique repose sur une collecte massive de données, souvent sans le consentement éclairé des utilisateurs, soulevant ainsi des questions éthiques.

Les réseaux sociaux : un maillon à risques pour les données

Si les réseaux sociaux sont une mine d’or économique, ils comportent aussi des risques majeurs en matière de protection des données :

1- L’exploitation abusive des données : Les utilisateurs béninois, souvent peu informés sur leurs droits numériques, partagent des informations sensibles sans mesurer les conséquences. Ces données peuvent être vendues à des tiers ou utilisées pour des pratiques telles que le micro-ciblage, une technique influençant les comportements d’achat ou les opinions politiques.

2- Les failles de sécurité : Les incidents de piratage sur les plateformes sociales exposent les données des utilisateurs à des acteurs malveillants. Une fuite d’informations peut compromettre la confidentialité, la disponibilité et l’intégrité des données.

3- La désinformation et la manipulation : Les algorithmes amplifient souvent les contenus sensationnels ou polarisants, exposant les utilisateurs à des fake news ou des manipulations psychologiques.

4- Le manque de régulation locale : Bien que le Code du numérique béninois établisse des bases pour la protection des données personnelles, son application reste limitée. Les réseaux sociaux, majoritairement contrôlés par des entreprises étrangères, échappent souvent au cadre légal béninois.

Comment minimiser les risques ?

.Plusieurs moyens efficients peuvent être explorés dans la réduction des risques liés à l’utilisation des réseaux sociaux.
D’abord, il sied de sensibiliser les utilisateurs aux bonnes pratiques numériques, notamment en limitant le partage d’informations sensibles et en paramétrant leurs comptes pour plus de confidentialité. Les utilisateurs doivent comprendre les implications de leurs actions en ligne et les moyens de protéger leurs données.
Ensuite, les autorités doivent aussi veiller à la transparence des pratiques des entreprises, notamment sur la collecte et l’utilisation des données. Ces entreprises doivent être tenues de divulguer clairement comment les données des utilisateurs sont collectées, stockées et utilisées.
Enfin, investir dans des solutions locales et encourager l’innovation numérique nationale peut offrir des alternatives sûres et adaptées aux besoins des Béninois afin de renforcer le contrôle des données au niveau national.

Les réseaux sociaux au Bénin représentent un double visage : celui d’un levier économique puissant et d’un vecteur de risques potentiels pour les données personnelles. Si leur exploitation est importante pour le développement numérique du pays, une régulation proactive et une sensibilisation accrue des utilisateurs s’imposent pour garantir un équilibre entre opportunité et protection. Pour les Béninois, il s’agit non seulement de profiter de ces plateformes, mais aussi de le faire en toute conscience et sécurité

Sègla Mauriac Camus AHOUSSINOU

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